Des initiatives éclosent … enfin !

Des initiatives éclosent … enfin !

Les journées du 13 et 14 avril ont été marquées localement par des prises d’initiatives, encore hésitantes, marginales et indubitablement à contre temps, mais qui traduisent la volonté d’une partie de la base de sortir de l’ornière dans laquelle s’est embourbée, dés le départ, la mobilisation. Gestes dérisoires témoignant d’une fin de mouvement comme c’est rituellement le cas, ou signe d’un changement de tempo et de crédo ? 

Nous reviendrons prochainement et plus longuement sur les semaines qui viennent de s’écouler car déjà un bilan s’impose. Pour l’heure, goûtons les quelques instants volés à l’agenda officiel des partenaires sociaux, quels qu’ils soient.

Le printemps des peintres 

Jeudi matin, en parallèle de la manifestation appelée par l’intersyndicale, on annonçait un rassemblement organisé par des lycéens. Ce qui fut dit fut fait, mais convenons que la jeunesse scolarisée demeure largement étrangère à ce qui se joue dans les rues de la ville depuis janvier. Pas plus que de Saint Louis la semaine précédente, le bol d’oxygène n’est venu de la rue Cazin ce matin-là. Non ! La surprise se lisait sur les murs de la sous préfecture où quelque street artiste y avait maculé à la bombe de peinture un inoxydable « Ni dieu Ni maître » du plus bel effet. Une œuvre rupestre qui se soustrait aux canaux officiels de la décoration urbaine chère à Frederic Cuvillier ; voilà qui mérite déjà d’être salué.

On les entend d’ici les grincheux railler le geste gratuit d’un crédule, radicalisé de surcroît,  sous l’emprise d’une violence fantasmée véhiculée par les réseaux sociaux. Brillant comme la prose de Darmanin ou celle de Delta FM qui nous informe que : « la sous-préfecture de Boulogne a été la cible de dégradations (…)La devise de l’anarchisme, « Ni Dieu ni Maître », a été taguée en lettres bleues sur la façade du bâtiment, situé en haut de la grand rue, à Boulogne. »

C’est évidemment avec un sourire complice que nous avons accueilli ce geste primesautier et printanier, mais pas uniquement. « Ni Dieu Ni Maître » avouons-le, de but en blanc, on s’en tamponne. Ceci étant, dans un contexte de confrontation sociale où l’Etat et la bourgeoisie ne reculent devant aucune ignominie d’aucune sorte, tout de suite ça résonne autrement, d’une note plus collective ; à plus forte raison lorsque l’action est réalisée au nez et à la barbe des petites mains du pouvoir politique en place – L’ordre Républicain ! autrement dit, la toute puissance d’une classe sociale contre une autre ; la dictature de la bourgeoisie.

Alors, oui, Bravo l’artiste !

Les illusions perdues

Convenons que la décision rendue par le conseil constitutionnel promulguée deux heures après par Macron était ce qui pouvait nous arriver de mieux dans le climat actuel. Ce point de vue ne sera évidemment pas partagé par ceux qui entretiennent un rapport quasi superstitieux au régime de la démocratie bourgeoise. De ceux-là, malgré la cure de désintoxication que le pouvoir leur administre depuis un moment, il n’y a de toute façon rien à attendre. Et heureusement que le RIP a lui aussi été rejeté. On en avait suffisamment soupé à l’époque avec le RIC de certains groupes de gilets jaunes…

Conscients que la lutte est l’unique planche de salut des prolétaires, quelques individus avaient décidé de ne compter que sur eux-mêmes et ne surtout pas s’en remettre à la décision d’apparatchiks de la politicaillerie nationale. Sans nouvelle des bureaux syndicaux qui attendaient sans doute les ordres de Paris, un flyer appelant au rassemblement le vendredi 14 avril à 17 h 30 fut distribué la veille au cœur de la manifestation, ainsi qu’à Capécure.

La réception fut à la fois polie et entendue, mais quelle ne fut pas la surprise quand l’intersyndicale appela à son tour au rassemblement, mais … à 18 heures ! L’UL CGT finira par se caler sur l’horaire diffusé initialement. Don’t act.

A contre courant

Une centaine de personnes s’est ainsi retrouvée au pied de la sous préfecture, surveillée à distance par une compagnie de CRS rangée le long du parking Mariette. Après quelques atermoiements et appels « à bouger » lancés à la cantonade, enfin le cortège s’est formé empruntant la Grand rue à contre sens de la circulation. En toute liberté, on retrouva l’espace d’une déambulation jusqu’au port la spontanéité et l’énergie des manifs nocturnes de gilets jaunes ou de celles du samedi matin. Bonne dynamique, bons slogans, on découvrait avec surprise une énergie habituellement refoulée sous les décibels de la sono syndicale. A la fin de la promenade, un appel à rassemblement fut décidé pour le lundi 17 avril à 18 h 30.

Un point de vue ouvrier 

La participation d’un groupe d’ouvriers de Capécure au rassemblement du vendredi 14 avril a permis d’échanger brièvement les points de vue. Le constat est partagé : un calendrier de dates espacées et la manifestation répétée comme principal mode d’action et d’expression ne permettent pas de peser efficacement dans le rapport de force. Autre point d’accord, la grève ne s’est pas étendue au-delà de quelques secteurs et l’absence de coordination entre eux a été une limite notable. A propos des actions menées lors des journées du 7 et 23 mars, le même regret a été exprimé qu’elles ne se soient pas prolongées ; qu’elles n’aient pas été conduites et reconduites dans une dynamique large incluant plusieurs boîtes de la zone. Malgré cela, la détermination subsiste mêlée d’un sentiment d’impuissance avec la volonté de garder de l’énergie et de rebondir sur des accords et problèmes internes …

Le mot de la fin

Afin d’élargir le spectre géographique de la réflexion, nous réservons le mot de la fin à un camarade qui, depuis Quimper, synthétise parfaitement l’enjeu du moment : « Comment sortir du folklore, et frapper vraiment le capital ? »

Boulogne-sur-mer, le 16/04/2023

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