Mardi 17 décembre : grèves, manifestation et actions directes

Mardi 17 décembre : grèves, manifestation et actions directes

A Boulogne-sur-mer, la zone industrielle de Capécure demeure au coeur du rapport de force qui oppose le travail au capital. A la veille des fêtes de fin d’année, plusieurs millions d’euros de marchandises travaillées s’apprêtent à rejoindre le marché de Rungis où d’autres places commerciales en France et ailleurs.

Une première action de blocage de poids lourds, rapidement enserrée par la police, a débuté vers 8 heures du matin. Progressivement, le nombre de participants s’est étoffé et le cortège prit la décision de fausser compagnie à la police pour prendre la direction de la gare de marée.

Sur le boulevard longeant les 500 mètres de quais de chargement, plusieurs points de blocages furent promptement dressés. A l’aide de palettes et des pneus enflammés, l’entrée et la sortie de la zone ont été interdits aux camions chargés de marchandises ou en attente de l’être. Le rapport de force a donné lieu à de belles prises d’initiatives collectives. Avec derrière elle les pompiers en attente, la police a tenté à plusieurs reprises de repousser les travailleurs afin de reprendre les axes de circulation et éteindre un à un les feux allumés sur la chaussée.

combattre le capital et se réapproprier l’espace

Ces derniers temps, des hommes ou des femmes en uniforme nous ont signifié qu’il était admis de manifester mais qu’il était interdit de bloquer la circulation des véhicules et surtout d’enflammer des pneus ou des palettes sur les axes routiers. « Monsieur le préfet ne veut pas ! » Mardi matin, un ouvrier leur répondit « qu’on n’était pas là pour défiler, qu’on n’était pas des moutons ! » et les actions de se poursuivre …

Si ces dernières décennies, nombre de luttes furent portées hors de l’entreprise pour déjouer le trop faible nombre de grévistes, on a constaté que, dans la rue aussi, les marges de manoeuvre se réduisaient progressivement.

Le contrôle de l’espace et sa réappropriation sont apparus comme indispensables aux acteurs de la lutte afin de pouvoir réellement bloquer la marchandise et taper au portefeuille du patronat. L’année dernière, les Gilets Jaunes au sein desquels on compte nombre d’ouvriers s’étaient emparés à leurs tours de ces modes d’actions et s’étaient vus empêcher de les mener à bien. Il y a quelques années, des arrêtés municipaux avaient permis de condamner des grévistes à de lourdes amendes ; raison pour laquelle il est crucial de maintenir ce rapport de force sur le terrain et de marteler que ce sont les travailleurs et eux seuls qui déterminent les modalités d’actions dans le cours de la lutte entre les classes et non « le droit » derrière lequel se dissimule et se retranche la bourgeoisie.

multiplication des actions et jonction avec la manifestation

Alors que le nombre de camions à l’arrêt augmentait, que les ouvriers de marée en pause assistaient au spectacle ou rejoignaient les points de blocage, les premières coupures de courant frappèrent les entreprises de la zone, achevant la tableau.

La tension montait à mesure que le temps passait, l’objectif étant de tenir jusqu’à l’arrivée de la manifestation sur les points de blocage. A la mêlée et au gazage, répondaient le contournement et l’invective … Enfin la manifestation, imposante avec ses 4 à 5000 personnes arriva sur place et stationna de longs moments sur les axes de la zone prenant le relais des bloqueurs du petit matin.

Le 18 décembre sur France Inter, un patron de la zone ( JC David, salage et fumage) évoquait justement les blocages et les coupure de courant. Il affirmait avoir perdu une journée de travail, non pas « le sien », faudrait-il lui rappeler, mais celui que lui fournissent ses ouvriers et disait « ne pas comprendre qu’on bloque ainsi l’économie ». Décidément, ces gens là n’entendent rien à rien, ni à l’économie capitaliste, ni à la société qu’elle engendre …

et de plus belle la nuit suivante !

A partir de 22 heures, une nouvelle action de blocage de poids lourds débutait à la périphérie de la zone. Elle s’est déplacée à mesure que la police détournaient les camions, les aidant à gagner l’autoroute. Progressivement ce sont plusieurs dizaines de véhicules qui se sont retrouvés à l’arrêt et les chauffeurs invités à gagner leur couchette pour la nuit. Les pompiers une nouvelle fois escortés de la police furent à leur tour invités à regagner leur caserne, ce qui fut fait sans incident.

Vers deux heures du matin, la fatigue se faisant sentir, c’est en groupes que l’on abandonna les camionneurs endormis aux bons soins des policiers et des pompiers rapidement revenus sur les lieux …

                                                         Boulogne-sur-mer, le 18/12/2019

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Taper au porte-feuille du patronat

Sous le régime de la production capitaliste, trois industries occupent une place de premier plan aux côtés de la fabrication et de la vente de bien manufacturés, ce sont les secteurs de l’énergie, du transport et de la communication. 

A Boulogne-sur-mer, premier port de pêche en France avec 36 000 tonnes débarquées à l’année, un mouvement social digne de ce nom permet d’en faire la démonstration. Au coeur des 153 ha de la zone portuaire de Capécure se concentrent 140 entreprises qui travaillent à l’année 380 000 tonnes de produits de la mer. Ainsi, lorsque les axes routiers de la gare de marée sont partiellement paralysés et le courant coupé pendant quelques heures, les patrons dénoncent des pertes colossales. On compte sur eux pour solliciter, comme à chaque fois, leurs assureurs …

Sans logiciels de commande il leur est impossible de faire partir la marchandise. Les machines sont arrêtés, les ouvriers renvoyés chez eux et des tonnes de marchandises définitivement perdues. 

Enedis a condamné ces actions en appelant à la responsabilité et au respect du « service public ». Les patrons annoncent vouloir déposer une plainte collective et le préfet lancer une enquête. De leur côté, les ouvriers ont répondu qu’ils « ont toujours repris leur outil de travail pour faire entendre leurs revendications ». 

Ajoutons que le 17 décembre, l’antenne de télé-radio de l’agglomération a également été ciblée. Durant plusieurs heures, les opérateurs de téléphonie n’ont peu émettre et les émissions de télévision et de radio ont été interrompues. 

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