Cote d’opale 2012 – Le plus terrible terrain de jeux

Cote d’opale 2012 – Le plus terrible terrain de jeux

 

1948, l’Europe est en pleine reconstruction. Cette même année, Londres accueille les premiers Jeux Olympique d’après guerre. Ces 15 jours de sport doivent être le symbole de la toute récente paix (c’est d’ailleurs pour cette raison que l’Allemagne n’est pas invitée et que le Japon refuse d’envoyer une délégation). Vu le contexte particulier, et les moyens minimaux mis a disposition par le comité olympique anglais aux délégations étrangères, ces JO sont rapidement surnommé les « Jeux de l’austérité ». 64 ans plus tard, Londres renouvelle l’expérience. Le contexte est différent, mais en pleine période de récession économique et en pleine crise politique, le gouvernement anglais veut éviter que le surnom de l’édition de 48 soit réutilisé pour cette nouvelle édition. En effet, le système capitaliste ultra libéral soutenu par l’UE est en chute libre et montre clairement ses limites. La majorité des dirigeants des pays de l’Union Européenne imposent cures d’austérité sur cures d’austérité aux populations afin de sauver les intérêts d’une minorité d’hommes politique et patrons. Le Royaume-Uni n’est pas épargnée et tous les secteurs économiques et sociaux britanniques sont aussi touchés par ces cures. Tous, sauf les JO.

 

arton742.jpg

 

Londres explose son budget

Rien n’est trop ambitieux pour les Jeux Olympique. Un budget de départ de 3,4 milliards de livres était alloué à l’organisation. Début 2012, à 6 mois de la cérémonie d’ouverture le budget est passé a plus de 9 milliards de livres (plus de 13 milliards d’euros). 1 milliard de livres, soit 1,16 milliard d’euros, étant affecté au pharaonique budget sécurité. Pourquoi un budget sécurité aussi important ? Il était prévu au départ de dépenser 475 millions de livres lorsque Londres a été choisi. Depuis ce budget n’a pas cessé d’augmenter. Une des villes les plus équipée en système de surveillance des populations profite donc de cet événement pour financer encore un peu plus son dispositif liberticide. Les attentats du métro de Londres en 2005 et les émeutes de l’été 2011 sont autant de prétextes médiatiques pour justifier cette folie sécuritaire1. Le boum de la sécurité revient à Hackney, un quartier « délaissé » de l’Est de Londres, qui, accueillant le village Olympique, est devenue une véritable forteresse en quelques année. Les caméras y ont poussés comme des champignons, imitant l’inutile système déployé dans l’ensemble de Londres depuis une décennie.

 

 

A Hackney, plus de place pour les pauvres, les artistes et les punks

Hackney était un quartier de Londres constitué de terrains vagues, d’entrepôts à l’abandon et de projets immobiliers non achevés. Cette zone était surtout le lieu de vie d’un grand nombre d’artistes fauchés, et plus globalement d’une population que la presse bourgeoise et la classe politique qualifie généralement de « en marge de la société » ou « voyous ». Ces gens étant simplement des personnes dont l’explosion du prix de l’immobilier local à naturellement exclut de Londres. Avec le projet Londres 2012, la municipalité choisie de sacrifier cette zone « gênante » en la choisissant comme lieu du village olympique. Les squats et le dynamisme artistique et humain d’Hackney vont rapidement laisser place au nouveau stade Olympique et aux habitations de « haut-standing » qui accueilleront les sportifs du monde entier. Comme à Pekin en 2008, ou c’était d’ailleurs beaucoup plus flagrant, les Jeux Olympiques de Londres sont encore une fois l’occasion d’exclure le prolétariat des villes par l’intermédiaire de projet d’aménagement du territoire ubuesque et par la gentrification des quartiers populaires.

Le reste de Londres n’est pas exclut de ce projet. En effet, les nombreux squats politiques de la ville sont évacués les uns après les autres afin de supprimer tout éventuel bastion de contestation. Dans un même temps, des lignes de transport en communs ultra-moderne voient le jour (comme la East London Line rénovée en 2008) dans la métropole. Transport en commun traversant les quartiers populaire de Londres mais dont le prix d’accès (compris entre £3,5 et £7 en fonction des zones) en exclut automatiquement ses habitants.

Si le profil de Londres change complètement a l’approche de l’événement, d’autres régions périphériques sont elles aussi touchées. Parmi elles, la région Nord-Pas-de-Calais, porte d’entrée pour le Royaume-Uni, subit de plein fouet l’engouement Olympique avec des projets portés par le PS local et soutenus par les autres partis politiques.

calais-couleurs.jpg

 

 

« Nos territoires s’apprêtent à « accueillir le monde » » – D. Dupilet

Au lendemain de la victoire du projet londonien au détriment du projet parisien, c’est l’émoi chez les dirigeants de la région Nord-Pas-de-Calais. En déclarant dès les jours suivant cette nomination « Si les JO s’étaient tenus en France, personne ne serait venu chez nous. », Dominique Dupilet (président du conseil général du Pas de Calais) est très clair sur ses intensions. Lui et ses camarades à la tête des pouvoirs locaux veulent tirer profit au maximum

de cet événement. Un cirque similaire à celui des politiciens britanniques est alors en marche. On nous fait rapidement miroiter un développement économique de la région exceptionnel et une manne financière avec de nombreux emplois à la clef. Dans une région touchée par les licenciements, les fermetures d’entreprises et la morosité, ce discours, porté par la presse locale, a évidemment eu un écho favorable auprès des populations précaires. Mais que cache en réalité cet engagement Olympique dans la région qui compte 7 des 10 villes les plus pauvres de France ? Par l’intermédiaire du projet « le plus grand terrain de jeux », Dupilet et tous les élus locaux profitent en fait de l’occasion pour financer la remise aux normes, la construction et la modernisation des infrastructures sportives et touristiques de la région2, et ce avec des fonds publics. Cet argent public va donc une nouvelle fois servir la cause des entreprises privées. Rappelons que ce genre de projet, malgré son caractère « populaire » ne profitera au final qu’aux classes privilégiées de la population et à la petite bourgeoisie locale. En effet ces structures qui brillent par leur modernité ne créent en fait que de l’emploi précaire (CDD, saisonniers ou interim). De plus leur coup de fabrication en fait des lieux de sport, culture ou tourisme dont le prix d’entrée est prohibitif et donc inaccessible aux classes populaires déjà dépouillées par le patronat nordiste…

Ainsi dans un autre cadre que dans la banlieue londonienne, le grand bal des grues, engins de chantiers et entreprises privées du bâtiment est ici aussi sur le pied de guerre pour que toutes ces infrastructures soient prêtes à temps.

 

1 – En plus d’être ultra sécuritaire, ce dispositif est totalement inefficace, car il a été incapable de prévenir ces deux évènements.

2 – Par exemple la base nautique de St Laurent Blangy ou la base de voile de Blériot Plage

Ce contenu a été publié dans Production capitaliste de lʼespace. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.