EVS = NO FUTURE!
Depuis plusieurs années, avec la création des premiers contrats précaires et l’apparition des aides éducateurs, le besoin de personnels supplémentaires pour l’aide administrative, la vie scolaire, puis l’accompagnement des élèves en situation de handicap est réel. Malgré ça, en 2011, le bilan est bien lamentable …
Après toutes ces années de bons et loyaux services, il n’existe toujours aucune perspective de pérennisation : cet emploi, aux yeux de l’état, ne mérite toujours pas de reconnaissance statutaire.
Difficile de savoir ce qui se passe dans l’enseignement depuis quelques années … une méthode est pourtant connue, l’accumulation des réformes pour les oublier au plus vite, et faire rentrer pleinement le service public dans une logique de rentabilité.
L’école fabrique de l’inégalité, à commencer par le réseau EVS-AVS-assistant d’éducation, ATSEM… Nous ne parlerons, ici, que du cas EVS (employé(e) de vie scolaire) car les situations et conditions de chacun sont tellement différentes et scandaleuses qu’il faudrait un bouquin pour toutes les (d)énoncer. Par contre, les principes d’injustice et d’exploitation se rejoignent littéralement, peu importe le poste.
Rappelons que les EVS, sont recruté(e)s à très bas salaire, sous des contrats précaires différents et, pour la plupart, sans une formation autre que symbolique.
Il existe 2 profils d’EVS :
- l’assistance administrative aux directeurs d’école
- l’aide à la scolarisation des élèves « handicapés » (nommés ainsi par le système, mais beaucoup d’élèves ayant cette appellation ont plutôt un profil d’enfant en situation d’échec face à un environnement social fragilisé)
Ni les directeurs et enseignants, qui auraient plus de difficultés à devoir fonctionner sans eux, ni les parents d’élèves, qui y voient une amélioration certaine pour les enfants, ne mettent en doute, aujourd’hui, l’intérêt de ce métier d’employé de vie scolaire.
Dès 2006, le poste d’EVS fût implanté dans les écoles. Les personnes signaient un contrat d’un an renouvelable, un CAE (contrat d’accompagnement à l’emploi) de 20h semaine, pouvant aller jusqu’à 2 ans, ayant pour but de faciliter l’insertion professionnelle des personnes sans emploi, ou un CA (signifiant ironiquement « contrat d’avenir ») de 26h semaine pouvant aller jusqu’à 3 ans. Payés au smic horaire avec si peu d’heures effectuées, autant dire que la rémunération mensuelle ne payait et ne paie toujours pas de mine. Par contre, les employeurs sont exonérés de cotisations sociales et les subventions qu’ils reçoivent pour ces contrats, elles, sont plus qu’intéressantes … En CAE, la subvention varie de 75 à 90% du salaire. En CA, l’employeur reçoit une aide forfaitaire qui correspond au montant de l’allocation que touchait le bénéficiaire des minima sociaux engagé.
Dans tous les cas, ces contrats précaires ne servent qu’à appauvrir des personnes qui les subissent, mais participent aussi à l’anéantissement du service public d’éducation.
Premier état des lieux, ce genre de contrat annoncait déjà un barrage à une proposition d’emploi stable et durable, puisque les objectifs en faveur de l’employé, fixés par l’état, ne reflétaient en rien la réalité. Les salariés sont exploités, financièrement et psychologiquement, et ne bénéficiant pas de la sécurité de l’emploi, ils sont souvent contraints à encaisser sans broncher sous peine d’être renvoyés cyniquement à leur situation précédente.
Premier scandale, les horaires …
La personne employée en CAE était, dès la rentrée, soumise à effectuer des heures supplémentaires non payées, avec pour excuse le rattrapage des vacances scolaires. Cette pratique fût assez rapidement contestée par quelques evs et par certains enseignants et directeurs. En effet, après vérification, les syndicats se sont prononcés sur le fait que, n’existant pas de convention ou d’accord d’établissement conclu selon le droit commun (art. L212-8 du Code du Travail), la pratique qui consiste à faire effectuer des heures complémentaires non rémunérées pour récupérer les vacances scolaires est illégale . Les vacances scolaires sont des congés de faits.
Bref! Une belle arnaque qui aurait du, à grande l’échelle, entraîner l’éducation nationale devant les Prud’hommes, comme l’aurait été une entreprise privée ayant commis les mêmes pratiques.
Désormais, ils prennent soin, lors de la signature du contrat, de présenter un document officiel stipulant que le salarié donne son approbation pour effectuer des heures supplémentaires gratuites dans le cadre de son contrat. Quelles belles et consciencieuses méthodes!
Autre scandale, l’absence de formation
Les EVS arrivent sur le terrain sans formation. Pour travailler avec des enfants, tout salarié a le droit d’être formé préalablement (comme dans tous les métiers). Dans la mesure où l’on ne demande pas, lors d’un entretien d’embauche, à un(e) evs d’avoir les compétences et l’expérience requises pour l’aide à la scolarisation d’un élève en situation de handicap, une formation préalable aurait automatiquement du être proposée. Le contraire frôle l’aberration, et c’est effectivement le cas… L’evs doit, dès son arrivée, fournir une quantité d’efforts d’adaptation, et doit également employer certaines capacités qu’il ne maîtrise pas forcèment. Et tout ceci, biensûr, durant sa période d’essai.
Pendant la durée du contrat, les personnes embauchées en CAE (avant le dispositif CUI) se faisaient des illusions, la formation n’étant pas obligatoire dans ce type de contrat, il suffisait de les inciter à cocher la case « non » dans la rubrique formation de la convention. Pour les CA, la formation était obligatoire, elle était même l’enjeu prophétisé par le ministre de l’éducation nationale, mais on leur suggérait simplement de cocher la case « formation interne, adaptation au poste de travail » sur le contrat, et le tour était joué!
Soulignons que certains evs ont eu le courage de déposer un dossier aux Prud’hommes et ont obtenu gain de cause pour le motif : défaut de formation.
Renouvellement, de qui se moque t-on?
Le ministère de l’éducation est un inconditionnel de la précarité, puisqu’un nouveau contrat précaire vient toujours chasser le précédent. On renvoie donc les EVS à la case départ, la case « chômage »… Un contrat de travail dont la durée va de 6 mois à 3 ans. Il n’y a aucune possibilité de le prolonger, donc d’insérer professionnellement le salarié arrivé en fin de « mission ». Le fait d’utiliser des personnes, souvent fragilisées par le système, pour pallier au manque d’adultes dans les écoles et combler le déficit d’éducation, sont des pratiques qui portent ce nom : l’exploitation. Après plusieurs mois ou années de boulot, la porte comme remerciement !
Il est grand temps de se rendre compte que ces méthodes engendrent des situations assez détestables. Les personnes, qui attendent un renouvellement de contrat sont complètement isolées. Il arrive souvent que l’EVS se voit refuser ou accepter un renouvellement de contrat le dernier jour de celui-ci, ou au delà. Ceci est, en grande partie, dû au fait que le cheminement des conventions est assez abracadabrant, ces conventions doivent être signées à la fois par, le Pôle emploi, le référent du lycée mutualisateur, le Conseil général et l’employé, sachant que les dossiers ne sont biensûr pas traités le jour même, l’attente devient alors incommensurable.
Tous les ministres de l’éducation ont créé un nouveau contrat précaire.
La spirale de la précarité accouche d’une multitude de sigles qui nous perdent et nous divisent. Soyons sûrs que le prochain ministre saura trouver un nouveau contrat précaire à sa sauce avec un nouveau sigle.
De gauche comme de droite c’est la précarité qu’ils nous imposent.
Il faut se battre pour exiger que le seul recrutement possible soit celui de personnels à statut. Un vrai salaire avec les mêmes droits pour tous!
L’Etat licencie donc massivement, et en même temps Sarkozy annonce, à grands renforcements médiatiques, la création de nouveaux emplois aidés, pour, soit dit en passant, « faire face à la crise ». Mais que deviennent alors les collègues arrivés en fin de contrat? Ils se foutent de qui? De ces emplois, l’enseignement en a réellement besoin. Pourquoi, donc, sont-ils précaires? Les missions des EVS dans les écoles sont de vraies missions, elles correspondent à de vrais besoins! Et qu’advient-il des élèves de toute cette mise en scène? L’enfant qui, bien souvent, trouve un équilibre avec cette personne spécialement présente pour l’aider à avancer, cet enfant devient tout autant victime des agissements du gouvernement.
Il faut envisager de porter la lutte EVS-AVS sur le plan du respect du code du travail et non la laisser contraindre dans le champ clos de l’éducation nationale, car les personnes en situation de précarité auront à se battre en tant que travailleurs en fin de contrat et non comme enseignants, ni même comme salariés de la fonction publique… Pouvons-nous penser qu’il s’agirait d’un vaste projet de privatisation de l’éducation nationale par l’introduction progressive de personnels de droit privé au sein du service public? Les premiers à payer les frais de cette liquidation sont les EVS -AVS. Ils représentent les futurs contractuels de droit privé de l’enseignement, placés sous l’autorité de fonctionnaires petits patrons…
N’oublions pas que plusieurs cas de jugements aux Prud’hommes ont permis d’éclaircir certains points et mettre le ministère dans une position, pas des plus confortables. Mais ces informations, hèlas, n’ont pas été, ou très peu, relatées par les médias. Les principaux motifs invoqués étaient, l’absence de formation, défaut d’accompagnement à la VAE, paiement des congés payés et des heures complémentaires, rupture abusive de contrat de travail, remboursement des tickets de transport etc …
Revendiquer ses droits est légitime. Lutter, s’organiser, entamer des actions, créer des collectifs, sont des combats qui ne doivent pas effrayer le salarié, victime des pratiques douteuses du gouvernement. Les conditions de travail, la distance et le manque de communication entre les écoles, peuvent s’avérer néfastes, et ont tendance à nous isoler et nous diviser. Mais quand l’union devient possible, la lutte la devient également.
Contrairement à ce que prétend le dicton, à force de bouffer de la merde, on ne finit pas par aimer ça! En tout cas on peut finir par avoir envie de la recracher sur les autres, sur ceux qui nous exploitent et nous méprisent!