CONTINUER ENCORE

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Ce 5 avril, l’association Calais La Sociale* tenait sa deuxième manifestation des « états généraux du boulot », un moment pour raconter, penser et ( soyons fous ! ) nous réapproprier le travail.

Cette rencontre s’est déroulée salle du Minck à Calais, lieu ouvrier historique du Courgain bâti à l’emplacement de l’ancienne criée ‒ Calais aussi est née de la pêche ! La veille, une soirée d’introduction artistique et musicale s’est déroulée à la Timbale, une « Fabrique coopérative célébrant l’art et la musique comme vecteurs d’engagement ». Une vingtaine d’organisations aux engagements multiples y tenaient leur table de presse disposées autour de tables où grignoter et se rafraîchir après passage à la buvette. Une centaine de personnes ont tenu à faire le déplacement.

C’est dans cet esprit que se sont tenues deux tablées ( débats ) : la première sur le thème « endurer la durée des luttes » ; la seconde autour de « à quoi servent nos petites manifs ? ». La proximité des thèmes, pour évidente qu’elle soit, se retrouvera dans tous les champs de lutte des collectifs, syndicats et associations en présence.

Endurer la durée des luttes

Animée par l’historien Romain Castellesi,** cette table ronde aura remis en lumière à travers des expériences vécues la multiplicité des obstacles à la possibilité de durer, voire d’aller jusqu’à la victoire des luttes. Étaient représentés : le collectif des femmes des licenciés de Calais, les travailleurs sans-papiers, les travailleurs-euses en lutte d’ Emmaüs, la CGT du CH de Calais.

Parler de la durée, cela peut se compter en années à l’image du soutien aux migrants dont on ne sait ce qu’il faudra encore endurer. D’un point de vue de la « machine humaine », la fatigue, l’usure physique et psychologique, et naturellement la punition pécuniaire ; autant de signe de faiblesse qu’il faut invisibiliser ‒ « je ne pleurais que chez moi » ‒ qu’exploiteront les patrons et leurs relais armés.

Durer demande un travail énorme dans les coulisses : réunions, intendance, contacts, collectes… et c’est éprouvant.

Certain.es y laissent gros, leur petit train de vie, leur vie privée, leur vie ( suicide )…

À quoi servent nos petites manifs ?

Pour cette seconde discussion, Calais La Sociale a donné la parole à la FSU Hauts-de-France, la CGT étudiant.es, lycéen.nes et apprenti.es 62, la marche des fiertés et l’Association France Palestine solidarité Calais ( AFPS Calais ).***
Les manifs, petites ou grosses sont un espace de revendications. À la question de leur efficacité, la réponse est arrivée d’emblée : elles ne servent pas à grand-chose si ce n’est de rencontrer et d’échanger avec d’autres travailleur.euses ‒ concernant les petites dont il est question, on rencontre… toujours les mêmes (ndr) ‒ ; constat qui s’appuie sur les défaites en chaîne que l’on a tous vécues, même si quelques petites choses sont obtenues en coulisse. Néanmoins, elles peuvent être un levier de mobilisation, notamment chez les jeunes. Enfin la manifestation seule, même fournie, ne peut aboutir sans action parallèle plus « sentie ».

En revanche, elles peuvent être des rappels permanents. Rappel aux victimes qu’elles ne sont ni seules ni surtout oubliées, rappel aux puissants que tant qu’il en restera un… À cet égard, les rassemblements de l’AFPS le samedi place d’armes à Calais depuis un an et demi restent une de ces petites manifs face à l’implacable agonie des Gazaouis décrite par J.-J.Triquet.

La convergence des luttes

Des petites luttes de boîtes méconnues aux Prides fortement médiatisées, il est une voie commune que les intervenants perçoivent, malgré « nos petites différences ». Les victoires des femmes de ménage des Palaces parisiens ou la pugnacité des agents hospitaliers sont autant de volontés à s’unir pour briser les obstacles.

Certes, il y a de l’ouvrage sur le métier pour construire une solidarité, de la diversité des combats d’émancipation. Et la présence d’une jeunesse combative aux côtés de militants rompus à la lutte, laisse accroire que ça va continuer encore.

Boulogne-sur-mer, le 14/04/2025

*https://calaislasociale.fr Auteur de Savoir commencer une grève aux éditions Agone.
**Le collectif antifasciste du bassin minier annoncé n’a pu être au rendez-vous.

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