En solidarité avec Nedjib Sidi Moussa

En solidarité avec Nedjib Sidi Moussa

Nous relayons la prise de position de nos camarades de l’Organisation Communiste Libertaire en solidarité à Nedjib Sidi Moussa. 

Nedjib Sidi Moussa a eu l’outrecuidance de modérer l’enthousiasme inconditionnel pour Boualem Sansal. Il est depuis la cible des frustrés de l’Algérie française ou des angoissés de la France algérienne

Dans son Histoire Algérienne de la France [1], Nedjib Sidi Moussa s’attaque à la centralité refoulée de la question algérienne en France. Il y analyse 7 événements, impliquant l’Algérie via ses partisans, ses détracteurs, ses ressortissants ou leurs descendances, qui ont émaillé la chronique politique, sociale ou culturelle en France entre 1965 et 2016. Il montre que la lecture de ces moments historiques doit se faire à l’aune de l’imbrication françalgérienne pour qui veut comprendre les « guerres culturelles françaises » et les problématiques fondamentales sur lesquelles elles s’engagent le plus souvent : le rapport à l’autre, l’immigration, la xénophobie, la nation, la religion, l’État, l’universalisme, la laïcité, la culture, la langue, les frontières…

Par un retour du refoulé dont l’histoire a le secret, Nedjib Sidi Moussa vient de frôler le peloton d’exécution médiatique pour insoumission et désertion de l’union sacrée intellectuelle en cours d’élaboration. Le 24 novembre il participait avec d’autres historiens comme Benjamin Stora et Sébastien Ledoux, à l’émission C politique sur France 5 à propos de l’incarcération en Algérie de l’écrivain Boualem Sansal, qui a soulevé une vive émotion et un fort élan de solidarité dans le monde littéraire francophone.

Sidi Moussa a eu l’outrecuidance de modérer l’enthousiasme inconditionnel pour Boualem Sansal, en faisant part de son malaise de voir présenter cet écrivain franco-algérien comme un héraut de l’universalisme des Lumières, alors qu’il est acoquiné avec l’extrême droite et qu’il promeut des discours sur l’immigration ou les musulmans dignes de Zemmour et du Rassemblement national. Tout en soulignant d’entrée qu’il était « contre toutes les prisons » et que ses réserves sur le personnage ne justifiaient en rien la répression dont il faisait l’objet.

Nedjib Sidi Moussa se vit alors livré à la vindicte de différents éditorialistes de la réacosphère, depuis les médias Bolloré jusqu’aux sites d’extrême droite, en passant par Marianne ou Le Figaro. L’attaque s’est rapidement généralisée sur les « réseaux (prétendument) sociaux » :

  •  « La virulence de l’attaque m’a contraint de suspendre mes comptes et de restreindre les moyens de me contacter, notamment sur mon site personnel. En effet, cette vague de cyberharcèlement s’est accompagnée d’un déferlement d’injures et de menaces quant à mon intégrité physique.
  • L’ampleur de ce lynchage illustre de façon dramatique les temps obscurs que nous traversons. Ce nouvel épisode des « guerres culturelles » à la française constitue un test pour les libertés démocratiques ainsi que pour notre capacité à faire société dans un contexte de crises multiples. »
  • écrit-il dans un communiqué publié le 2 décembre

Alors que Stora et Ledoux acquiesçaient et renchérissaient sur l’analyse de Sidi Moussa, c’est essentiellement ce dernier qui a fait les frais de cette « ratonnade médiatique » menée par les bas du front connectés. Mais c’est tout autant une « exécution pour trahison » par les plus policés des chroniqueurs de la police de la pensée qui le menace. Il n’est pas besoin de chercher bien loin pour trouver le racisme aux sources de cette histoire.

Mais Nedjib Sidi Moussa n’est pas la cible des frustrés de l’Algérie française ou des angoissés de la France algérienne que du seul fait de ses origines familiales. Ce sont aussi ses postions d’intellectuel internationaliste et révolutionnaire, adossées à une pensée politique historique reconnue et remarquée, qui le rende subversif et menaçant pour le système manichéen qui tient lieu de pensée critique aujourd’hui.

Honni comme islamophobe par une certaine gauche radicale à la sortie de La fabrique du Musulman ! Déprécié en Algérie pour ses analyses à propos du Hirak ! Exécré comme faux français, traitre et suppôt de l’État algérien par la réaction nationale depuis le 24 novembre… Nedjib Sidi Moussa est en premier lieu un empêcheur de penser en rond. Il nous donne matière à réfléchir au-delà du réductionnisme identitaire quel qu’il soit, dans la lignée d’un George Orwell qui énonçait que le véritable problème est « l’esprit réduit à l’état de gramophone, que l’on soit d’accord ou pas avec le disque qui passe sur le moment » [2].

Que Nedjib Sidi Moussa soit donc assuré de notre soutien dans le combat qu’il poursuit aujourd’hui.

Organisation communiste libertaire (OCL)

3/12/2024

P.-S.

Un comité de soutien est lancé : 

http://oclibertaire.lautre.net/spip.php?breve758

Le site de Nedjib Sidi Moussa : https://sinedjib.com

Notes

[1] parue aux PUF en 2022.

[2] The enemy is the gramophone mind, whether or not one agrees with the record that is being played at the moment. in George Orwell, La liberté de la presse, Préface proposée par Orwell pour « La ferme des animaux » 1945. https://www.orwell.ru/library/novel…

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